Waldemar Kamer

Mises en scène d'Opéra



Critiques du spectacle

(extraits) --------

DIE MORGENPOST : “Cendrillon est tout simplement envoûtante”

Si vous le voulez, vous pouvez vous envoler grâce à production de Waldemar Kamer de Cendrillon. Le metteur en scène, qui vit à Paris, a monté sa version allemande (écrite avec le dramaturge de Chemnitz Volkmar Leimert), comme s'il possédait un bâton magique : pling, la maison des La Haltière se transforme en boîte de jeux, plong le couvercle s'ouvre et toutes sortes d'animaux jettent des oeillades avant d'envahir l'espace. Plingplong on se retrouve soudainement sur les toits de Paris et on voit un des plus beaux décors de la saison (décors et costumes de Hinrich Hortstkotte). La plupart des dames n'obtient pas l'homme de leur rêves - c'est ainsi que le conte est écrit. Mais par contre elles chantent d'une manière féerique. Les messieurs, vifs et hauts en couleur peuvent flagorner et se pavaner - et ont les rieurs de leur côté. Le tout est dirigé par un seigneur du raffinement : Fabrice Bollon. Heureusement la pantoufle de verre chausse bien et Chemnitz possède dorénavant une des Cendrillons les plus ravissantes qu'on puisse imaginer.

Christiane Hamann-Pönisch, 5 décembre 2000

DIE WELT : “Amis de l'opéra, écoutez la province !”

L'Opéra de Chemnitz présente une traduction allemande et nous donne non seulement la première mondiale du prologue retrouvé, mais annonce aussi pour les années à venir tout un cycle d'opéras français autour de Massenet. Le succès de la première lui donne raison : après une étape intermédiaire avec la Pénélope de Fauré, on prévoit dans la saison 2002/2003 l' Esclarmonde de Massenet tellement difficile à distribuer. Osons la comparaison : les opéras de province démontrent un courage dont on ne pourrait même pas rêver dans la capitale, avec ses trois opéras. (...) Ils donnent même une leçon aux compagnies de disque en distribuant le rôle du prince comme un falcon. Ainsi ils montrent que l'opéra n'existe même pas en CD (où on a distribué un ténor). (...) La production de Chemnitz résonne comme la scène finale du Rosenkavalier qu'on aurait élargie sur deux heures. Amis de l'opéra, voyez cette Cendrillon.

Kai Luehrs-Kaiser, 8 décembre 2000

FRANKFURTER ALLGEMEINE ZEITUNG : “un tableau des états d'âme, à la manière française

La forme est tout : la Cendrillon authentique de Massenet à Chemnitz

Sur les toits de Paris les enfants enivrés par la lune dansent. Ils chassent des papillons dans la nuit. La ville lumière est étincelante et le danger d'une chute est grand, surtout pour les deux jeunes gens qui sont montés jusqu'ici pour chanter leurs plaintes d'amour. Ils ne se voient pas puisque dans le ciel la fée laisse encore flotter le voile de l'invisibilité entre eux. Mais leurs voix commencent à se fondre; d'un côté la chanson du prince charmant, qu'il a déjà pleurée dans la cage dorée de son palais, de l'autre le chant de Cendrillon, dont le motif d'amour, murmuré dans le palais de sa méchante belle-mère, rimait de plus en plus avec le nom du prince.

“N'était-ce qu'un rêve ?” craint Cendrillon le lendemain matin, quand tout reprend son train habituel. Dans la maison, elle est faible et son âme est simple comparée à la fausse pompe de Madame de la Haltière et de ses filles. Le prince ressent la même chose face aux courtisans pompeux et bruyants. Chez Jules Massenet le sentiment véritable se différencie clairement des éléments cabotins et sarcasti­ques qui caractéri­sent le monde des adultes. Cendrillon, créée en 1899, suit les penchants les plus profonds du compositeur. Et c'est pourquoi le metteur en scène Waldemar Kamer a reconstruit le prologue, qui a été coupé à la création. Dans le prologue les habitants de la maison de la Haltière traversent la cheminée pour se présenter, devant le rideau, au public. Ainsi le cercle se termine à la fin quand Pandolphe s’adresse à nouveau au public en disant “ici tout finit bien”.

C'est ainsi que le père faible de Cendrillon est revalorisé et Egon Schulz le chante - tout à fait selon les voeux du composi­teur et de son libret­tiste Henri Cain - avec une basse à la Molière; un tout petit peu ridicule, comme tous les adultes dans les mondes révés de Massenet, mais non sans dignité. Et quand il s'accoutre comme un coq pour le bal de la cour il fait même preuve d'un peu d'auto-ironie. Le rôle du prince mélancolique a été écrit pour une femme : il obéit à ses sentiments et il n'a pas encore refoulé ses côtés féminins. Massenet confie l'inconditionnalité d'un amour sans calcul uniquement aux femmes et aux jeunes garçons. D'ailleurs il écrit les meilleures mélodies pour les femmes. Britta Jacobus (le prince) et Nancy Gibson (Cendrillon) en profitent dans des effusions lyriques extravagantes. La fée (en fait la mère défunte de Cendrillon) n'a plus d'âme et ainsi Jana Büchner scintille dans les stratosphères comme une reine de la nuit française. Fabrice Bollon exige beaucoup de ces dames quand il leur demande à la fois de la douceur, de la lenteur et de l'intensité.

La version allemande, que Waldemar Kamer a écrite ensemble avec le dramaturge Volmar Leimert, n'assombrit pas cette légèreté. Si on considère que la tâche d'une mise en scène consiste à aiguiser l'oreille au caractère spécifique d'une oeuvre, elle a été bien remplie à Chemnitz. On ne cultive pas, à la manière allemande, la douleur individuelle, mais on peint un tableau des états d'âme, à la manière française - la forme est tout. Ceci implique qu'on ne nous prive d'aucun des ballets, ni même du pas de deux révé du prince et de Cendrillon, avec lequel le “ballet blanc”, l'acte blanc des ballets romantiques, fait son entrée dans l'opéra. L'effet de ces ballets ne serait pas si envoûtant si les costumes ne présentaient pas ce même métissage scintillant entre baroque et carica­ture. Cela fait également parti du conte de fées : les décors et costumes de Hinrich Horstkotte ne sont pas avares d'effets magiques, depuis la coquille de noix avec laquelle Cendrillon s'envole pour le bal, en passant par la cage dorée dans laquelle vit le prince jusqu'aux toits de Paris où l'amour trouve sa réalisation rêvée. Les enivrés de la lune (“Mondsüchtigen”) trouvent toujours une nouvelle demeure…

Bernd Feuchtner, 16 décembre 2000

OPERNGLAS : “les grandioses et merveilleux décors”

La mise en scène de Waldemar Kamer est rythmée par les grandioses et merveilleux décors et costumes de Hinrich Horst­kotte, des éclairages pleins d'atmosphère et les magnifiques chorégraphies de Gesine Ringel. Elle possède également une forte dose d'ironie scénique. Entre ces moments-là, le romantisme reprend ses droits, par exemple quand le prince et Cendrillon chantent leur ravissant duo non dans la nature, mais sur les toits de Paris, la nuit entre les cheminées fumantes. Que le château de leurs rêves se révèle être à la fin l'Opéra de Chemnitz (en miniature) est une fin conséquente pour une équipe de mise en scène intelligente et pleine d'esprit.

A. Schnackenburg, février 2001

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